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L'accessibilité, une vision globale - Un exemple vécu.

  Lorsque j'ai visité l'appartement que j'occupe seule depuis le mois d'octobre 1999, dans un immeuble neuf, situé dans un tout nouveau quartier, l'accessibilité semblait parfaite pour une personne à mobilité réduite.

Mais, la sécurité ne fait pas bon ménage avec l'accessibilité. Cet immeuble neuf est une véritable forteresse sécuritaire.

Arriver à mon appartement, c'est réussir un exploit, un vrai parcours du combattant.

Premier obstacle : le parking souterrain

Les places réservées aux personnes handicapées ont été attribuées à des locataires non handicapés, alors qu'à peine un tiers des logements sont occupés. Le gestionnaire de l'immeuble ignore l’existence de ces places réservées car elles ne sont pas marquées au sol.


Bilan : Le gestionnaire de l'immeuble accepte que je ne loue pas de place de parking avec l'appartement et je ne l’utilise pas.

Deuxième obstacle : l'accès à proximité de l'immeuble en véhicule

Un plot télescopique bloque l'accès de la voie piétonne à tout véhicule. Le système d'ouverture est réservé aux livraisons des commerces qui ont un bip. Il n’y a personne pour donner le passage aux transports spécialisés.


Bilan : tous les transporteurs râlent ; mon père utilise une voie réservée au bus puis  un petit passage laissé libre parce qu'un camion a, par chance, écrasé un plot.

Troisième obstacle : l'accès au hall d'entrée

Il n'est possible qu'avec un code ou la clef.

Les personnes qui m'aident quotidiennement sont nombreuses ; si un chauffeur, un médecin, une infirmière, un kinésithérapeute, une auxiliaire de vie ne connaît pas le code, il ne peut pas entrer et ne peut pas m'appeler.

Bilan : Plusieurs visiteurs sont déjà repartis, même si les habitués n'ont plus de problème !

 

Seule, en fauteuil, je dois réussir, assez rapidement, après avoir composé le code ou introduit ma clef, à tirer la première porte lourde, en reculant. Cette porte est dans mon dos lorsque je dois la refermer et le groom ne fonctionne pas.


Bilan : j'y suis parvenue 2 fois mais je n'ai pas pu refermer la porte

Quatrième obstacle : l’ouverture de la 2e porte vers les ascenseurs

Elle n'est possible qu'avec l'interphone ou la clef.

Les visiteurs qui ont réussi à franchir la première porte, arrivent à ouvrir cette 2e porte, lorsque je leur donne l'accès par l'interphone, s'ils ont compris comment celui-ci fonctionnait.

Seule, je dois introduire ma clef, la reprendre, pousser mon fauteuil sur une bonne longueur pour atteindre la 2e porte lourde à tirer. Depuis octobre, la temporisation nécessitait de le faire en moins de 8 secondes. Depuis hier, après de nombreuses réclamations, par téléphone et par écrit, un électricien est enfin venu pour m'accorder 6 secondes supplémentaires.  Les personnes valides ne sont plus obligées de courir mais est-ce suffisant pour moi ?

 

Bilan : Je ne réussis pas mieux cette opération en 14 secondes qu'en 8 secondes, mais je m’entraîne !

Cinquième obstacle : Utiliser l'ascenseur

L’ascenseur ne fonctionne qu'avec un code.

Les visiteurs qui n'ont pas ce troisième code n'iront pas plus loin, car il faut la clef pour utiliser l'escalier de secours !

J'ai le code et les boutons sont à la bonne hauteur !


Bilan : J'y arrive !

Sixième obstacle : entrer dans l'appartement

Les visiteurs qui ont réussi à franchir toutes les étapes peuvent sonner et je peux leur ouvrir la porte.

 

Mais si je rentre seule, je dois tourner la clef d'une serrure à trois points. Cette clef tourne très difficilement et même une personne valide doit utiliser ses 2 mains pour y arriver. Les réclamations auprès du gestionnaire de l'immeuble pour qu'un technicien passe améliorer cette situation n'ont toujours pas abouti.


Bilan : Depuis trois mois, je ne peux pas tourner la clef pour rentrer seule chez moi.

 

Bilan global

Je suis partie de chez mes parents pour être autonome et, en réalité, depuis trois mois, je ne peux même pas renter seule chez moi.

 

Conclusion

Un appartement qui respecte les normes d'accessibilité dans un immeuble parfaitement conforme, placé dans un quartier neuf, avec une voirie adaptée, peut ne pas convenir à une personne à mobilité réduite. Alors que l’accessibilité doit être envisagée globalement par l’ensemble des intervenants, la réglementation impose des normes aux concepteurs sans prendre en compte le rôle des gestionnaires du bâtiment.

La sensibilisation des professionnels de l’urbanisme et de l’immobilier constitue un enjeu majeur de la lutte pour améliorer l’accessibilité. Celle-ci ne doit pas seulement être envisagée ponctuellement lors de la construction d’un bâtiment, mais tout au long de son occupation.